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KTM AG : essayons d’y voir plus clair dans la crise actuelle

KTM AG
Le siège de KTM AG est basé dans ce bâtiment ultra moderne, à quelques kilomètres de l’usine.

KTM AG, le géant autrichien de la moto, est plongé dans une crise financière sans précédent, vous avez sans doute entendu dire. Fin novembre 2024, l’entreprise a été contrainte de se placer sous auto-administration pour gérer une dette astronomique de 2,9 milliards d’euros, la plus importante en Autriche cette année. Voici au moins un record. Cette procédure légale permet à KTM de réorganiser ses finances et ses opérations pendant 90 jours afin d’éviter l’insolvabilité.

La situation actuelle découle de plusieurs facteurs : une stratégie d’expansion agressive, marquée par l’acquisition de marques comme Husqvarna, GASGAS, et récemment MV Agusta, combinée aux effets persistants de la crise économique post-COVID. Et aussi, ou surtout, une mauvaise lecture de l’avenir du marché, avec une production toujours en hausse, au moment où le marché a commencé à se tasser, après l’euphorie de la liberté retrouvée après la pandémie, couplée à la hausse des taux d’intérêts et de l’inflation, plus une période électorale aux USA (oui, ça joue sur la consommation).

Le secteur du vélo a lui aussi été très fortement impacté par une offre bien supérieure à la demande, une situation totalement inverse à celle de la sortie du COVID, une fois encore. On peut quand même légitimement s’étonner que l’état-major d’une marque comme KTM AG au sens large (HVA, GG, KTM) n’ait pas su anticiper le ralentissement, et, surtout, se soit laissé déborder à ce point… Selon l’Association des créanciers alpins (AKV), KTM AG doit à elle seule 1,8 milliard d’euros, dont 1,3 milliard aux banques, 365 millions aux fournisseurs et 40 millions en salaires impayés. Chaud, quand même. Surtout pour une société qui a réalisé 108.9 millions de bénéfices l’année précédente. On n’est pas sur des juniors du business, là.

KTM AG
C’est derrière ces portes que sont fabriquées vos KTM, GASGAS et Husqvarna MX et enduro.

Pour faire face à ces défis, KTM a pris des mesures drastiques. L’entreprise prévoit une réduction significative de sa production pour rééquilibrer l’offre et la demande, ainsi que des suppressions d’emplois, avec près de 500 postes éliminés en 2024, sur les quelques 5000 que compte l’entreprise à travers ses filiales R&D et Components (ex-WP). Les remises excessives, qui nuisent à l’image de la marque (et plombent le marché de l’occasion), sont également en cours de révision. Et il ne serait pas étonnant que plus de modèles, notamment routiers, soient produits chez les partenaires financiers CFMoto et Bajaj.

KTM AG, fierté d’une région

Malgré cette crise, KTM reste résolument optimiste. Son PDG, Stefan Pierer, a déclaré : « La marque KTM est l’œuvre de ma vie, et je vais me battre pour elle. » Les ambitions de l’entreprise ne sont pas mises en pause : KTM continue de soutenir ses teams, que ce soit dans le très coûteux MotoGP, en MXGP, aux USA comme en enduro (qui représente une goutte d’eau en matière d’investissement). Ceci dit, on ne serait pas étonné que quelques pilotes pressent leur agent de trouver vite quelque chose ailleurs… Même s’il faut noter que KTM Racing GmbH est une entité différente de KTM AG, certes sous le même parapluie Pierer Mobility AG, mais n’est pas touchée par le processus de restructuration. Par contre, certaines séries lourdement sponsorisées par le groupe, on pense notamment au championnat du monde Hard Enduro, pourraient bien pâtir de la situation. A suivre à ce niveau-là.

La restructuration actuelle vise à consolider la position de KTM sur le marché mondial. Si elle parvient à surmonter cette épreuve, l’entreprise pourrait retrouver son statut de leader et redéfinir son avenir industriel d’ici la fin de l’année. Après tout, elle était dans la même situation en 1991, quand Stefan Pierer a débarqué pour renflouer le bateau et en faire aujourd’hui ce gigantesque paquebot, qui prend l’eau de toutes parts en ce moment.

Il y a moins de trois mois, je faisais partie d’une poignée de journalistes invités à visiter l’usine, à Mattighofen, le siège historique. Chaînes de montage, recherche et développement, usine de fabrication des cadres et des suspensions, musée, siège ultra moderne, on a tout visité. Et franchement, c’est très impressionnant, avec encore des dizaines de millions d’investissements en cours en matière de bâtiments. La ville entière est globalement « KTM city », et il parait donc difficilement concevable que les politiques et les acteurs économiques locaux n’aident pas la situation, en plus des partenaires financiers habituels que sont les Indiens de Bajaj et les Chinois de CFMOTO. Une fermeture pure et simple parait donc difficile à imaginer, avec 5000 employés sur le carreau d’un coup, un coût social autant qu’économique énorme pour la région. Et 13 nouveaux modèles dévoilés à l’EICMA, au milieu d’un stand géant qui ne sentait pas la restriction budgétaire.

Pour finir sur une notre française, le filiale basée à Lyon nous a assuré que « Cette réorganisation n’impacte en aucun cas les livraisons de motos, de pièces de rechange et d’accessoires. Aucune irrégularité n’est à prévoir dans l’approvisionnement des produits, et le Groupe Pierer Mobility AG a le plaisir de confirmer l’arrivée des prochaines nouveautés dès février 2025. » En gros, pour l’instant, tout baigne, malgré les inquiétudes. En espérant pour l’ensemble des acteurs, à la fois de l’entreprise et du marché, que la situation s’arrange au plus vite.

Par Rich’.

KTM AG
En centre-ville de Mattighofen trône le Motohall KTM, superbe musée à la gloire de la marque, à voir une fois.

 

 

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